Critique : Inception de Christopher Nolan
Le 25 juillet prochain sortira le nouveau et tant attendu film de Christopher Nolan : The Dark Knight Rises. L'occasion pour moi de vous présenter les longs-métrages de ce réalisateur de génie (enfin, peut-être pas tous). Commençons par son dernier en date, le très intriguant et exceptionnel Inception.
Remercions tout d'abord la Warner Bros qui, depuis le succès de The Dark Knight, fait une entière confiance à Christopher Nolan, le petit génie d'Hollywood, accepté grâce à ses films d'auteurs réalisés en Grande-Bretagne (Memento par exemple). Car il fallait être confiant, avec un scénario aussi complexe et original que celui-là. Le néologisme du titre désigne une manipulation mentale. Il s'agit d'implanter une idée dans le subconscient d'un sujet. Ainsi le héros Dom Cobb est un « extracteur » : il entre dans les rêves des autres pour soutirer des informations inaccessibles. Il s’agit de créer un espace mental que l’on visite à plusieurs, avec pour seul risque de se réveiller avant la tâche accomplie, ou de s’y perdre, à jamais. Notre héros est sollicité à des fins d'espionnage industriel pour ses capacités, cela lui coûtant sa famille. Il est contraint de s'exiler. Cependant, une chance de rédemption lui est offerte. Pour cela, il doit accepter avec son équipe d'experts de pratiquer une « inception »...
Le film est construit en deux parties. La première (pendant la première heure du film), est une phase explicative, durant laquelle tout le concept nous est expliqué (nous bourrant d'informations) pour nous préparer à l'immense scène d'action qui occupe la dernière heure trente. Avec ses différents niveaux de rêve, la construction de la mise en place de l'inception rappelle un jeu vidéo avec de nombreuses références cinématographiques. La première strate en pleine métropole rappelle Michael Mann (auquel le réalisateur rendait déjà hommage avec le prologue de The Dark Knight), la seconde dans l'hôtel en apesanteur fait bien sûr penser à un certain Stanley Kubrick. La troisième, dans la neige, n'a rien à pâlir des meilleurs James Bond. Et la dernière se passe dans les limbes, dans le subconscient de Cobb, où l'on peut voir les ruines d'une ville (reflet de ses pensées dans ce monde où le pouvoir, ici représenté par ces immeubles délabrés, finit par se détruire). C'est là que la narration de Nolan impressionne, car toutes ces séquences imbriquées amènent un ensemble limpide et cohérent. L'utilisation des ralentis et des différentes échelles temporelles marchent du tonnerre, et ce ne sont que quelques exemples des inventivités et des folies visuelles que se permet le réalisateur, en rappelant que le film a remporté l'Oscar des effets visuels en 2011.
Comme dans tout film de braquage, il y a une équipe, chacun ayant sa spécialité. Inception ne déroge pas à la règle. Tous les personnages sont complexes et intéressants. Il fallait donc un casting à la hauteur et Christopher Nolan s'est très bien entouré. Entre le génial Joseph Gordon-Levitt et Ellen Page (dont le prénom, Ariane, rappelle la princesse antique qui aida Thésée à ne pas se perdre dans le labyrinthe pour tuer le Minotaure, comme elle aidera le héros à ne pas se perdre dans son subconscient) en passant par Tom Hardy, Ken Watanabee, Cilian Murphy et Michael Caine (tous deux sortis des Batman). Le film vaut aussi bien sûr pour la prestation de Leonardo DiCaprio, alias Dom Cobb. Il est incroyable en homme tourmenté par son passé, qu'il essaie de revivre. On voit dans ce personnage les thèmes récurrents chez Christopher Nolan : la perte de la femme, la difficulté à aller de l'avant et la dualité entre Cobb et lui-même car son ennemi n'est autre que sa défunte épouse, Mall (émouvante et poignante Marion Cotillard), qui apparaît dans ses rêves. Inception est un film d'action et de science-fiction, mais c'est surtout une belle histoire d'amour, qui se révèle être le centre du film. Cette mélancolie n'a d'autre objectif que de toucher le spectateur pour éviter une certaine froideur dans trop de complexité et d'action, et c'est réussi.
Citons également la musique de Hans Zimmer, déjà compositeur avec James Newton Howard sur les Batman. Il signe ici une BO immersive, en mettant le son à fond (l'entrée du film avec ses cuivres tonitruants est juste renversante). Mélangeant musique et sound-design, ce score possède un rôle de première importance dans la narration en enveloppant le spectateur, pour mieux l'immerger dans le monde des rêves. Certains thèmes sont tous de même présents, comme celui de « Dream is collapsing » et de « Dream within a Dream » pour l'action, et le magnifique « Time » (que vous pouvez entendre en bas de cette page) pour le final. Parlons-en justement, de ce final, qui aura fait couler beaucoup d'encre. Ce dernier plan où Cobb fait tourner sa toupie (un totem, qui lui permet de savoir s'il rêve ou pas) qui se coupe avant que l'on ne l'ai vu s'arrêter. Nolan préfère nous laisser imaginer et créer nos hypothèses. De nombreuses circulent sur le Net, plus farfelues les unes que les autres. Mais en fin de compte, y a-t-il vraiment une réalité ? Chacun ne peut-il pas se faire son film ? Autant de questions que pose Nolan et qui donne à Inception un esprit métaphysique et qui en fait un puissant hommage au cinéma. Comme sur ses précédents films, le réalisateur britannique s'amuse avec son spectateur en le manipulant et l'intriguant, mais le fait ressortir de la salle des étoiles dans les yeux.
Note : 19/20